Le 11 décembre 2009, nous sommes allés notamment à Vivario et avons marché jusqu’à un piton rocheux surplombant la vallée du Vecchio, à 920 m d’altitude, où a été érigé un fort maintenant en ruines qui fait face au village: la Redoute de Pasciola. Ces vestiges ont été classés « monument historique suivant décision du 25 mars 1977″, ils sont la propriété d’un particulier.
Ce fortin que l’on pense avoir été terminé en 1771 sur instructions des français a été construit pour surveiller la vallée du Vecchio . Par la suite, sous la Convention ou le Consulat, il a été reconverti en prison par le général Morand, dont les pleins pouvoirs ont été accordés par Napoléon lui-même. Il y détenait les rebelles du Fiumorbu qui étaient parfois fusillés ou déportés.
Une page d’histoire a débuté à Vivario avec la naissance de Formose qui devint Pape:
L’éventualité de l’existence d’un Pape d’origine corse au sein de l’Eglise catholique pourrait laisser froid ceux qui ne sont pas de fervents pratiquants, et pourtant l’histoire de Formose, qui serait né vers 816 dans un hameau aujourd’hui disparu de Vivario, est intéressante pour plusieurs raisons. Son histoire a sa place dans ce site, en premier lieu par chauvinisme primaire. A titre de comparaison, il n’y eut qu’un seul Pape d’origine anglo-saxonne dans toute l’histoire de la papauté. Il y eut par ailleurs, au Vatican, d’autres représentants de l’île de beauté dont les célèbres gardes corses, prédécesseurs des gardes suisses. En second lieu, ce Pape a marqué l’histoire de la chrétienté, non pas par ses actes, mais à propos de sa mort car il a été jugé pour ses agissements en tant que Pape après son décès et a donc fait l’objet d’un procès posthume macabre et extraordinaire.
Formose eut une progression classique dans l’organisation ecclésiastique, simple prêtre il fut plus tard évêque de Porto, puis consacré Pape le 6 octobre 891, il le restera jusqu’à sa mort en 896. Il semble que ce soit plus en raison de ses prises de position politiques, que Formose ait été jugé à titre posthume, que pour sa gestion de l’Eglise. Il convient de rappeler le contexte historique et les événements qui aboutiront à la tenue de ce procès macabre.
En 814, l’Empereur Charlemagne s’éteint et son Empire est transmis à son fils, Louis 1er le Pieux, qui décèdera en 840. A sa mort, ses trois fils (Pépin 1er, Louis le germanique et Lothaire 1er) se partagent l’Empire par le traité de Verdun de 843. Lothaire 1er, au cours de son règne, pris l’ascendant sur la papauté et imposa par le sacre de son fils, Louis II, une main mise totale des carolingiens sur Rome jusqu’en 875, année du décès de ce dernier.
Louis II mourut sans héritier et les branches françaises et germaniques des carolingiens se disputèrent son Empire. La française l’emporta (sur arbitrage du Pape Jean VIII) sur la seconde et Charles le Chauve fut sacré Empereur. La branche germanique composée notamment de Louis le Germanique s’éteignit, et la dynastie carolingienne disparut définitivement en 888 quant l’Empire fut divisé en sept royaumes indépendants.
Cette disparition de la dynastie carolingienne raviva l’appétit de quelques uns, notamment de Guy de Spolète qui fut sacré Empereur en 889. Son fils Lambert, fut lui, sacré par Formose, devenu pape, le 30 avril 892, mais ce dernier agissait sous la contrainte et prit la décision d’en appeler à l’assistance d’Arnulf, fils de Carloman, qui se mit en marche sur Rome. Formose sacra Empereur le 22 février 896 ce même Arnulf, et décèdera le 4 avril 896. Arnulf quant à lui ne profitera pas longtemps de son rang puisque la ville sera reprise avant la fin 896.
La rancune toutefois était tenace: Lambert avait retrouvé son trône des mains du Pape Etienne VI qui avait succédé à Formose et imagina une vengeance contre la trahison de ce dernier. Elle fut exécutée par le Pape: Etienne VI organisa le procès le plus macabre que l’on puisse imaginer. Neuf mois après sa mort, Formose était traduit devant un tribunal d’ecclésiastiques. Ce simulacre de procès se déroula au sein même de de la basilique romaine Saint Jean de Latran construite au 4e siècle et qui était alors le siège de la chrétienté. Le cadavre de Formose est envoyé chercher, extrait de son tombeau et dépouillé de son linceul, il sera revêtu pour les besoins de son procès de tous les ornements dus à son rang et assis devant ses juges sur le trône pontifical, et puisqu’il ne peut se défendre seul, on désigne un curé pour parler à sa place. Ses juges commencent alors l’examen de la vie de Formose, le jugent indigne, proclament l’illégalité de sa promotion cléricale et de son accession à la papauté et finissent par annuler tous les actes qu’ils avait pris de son vivant. A la fin du procès, Etienne VI ordonne que Formose soit dépouillé de tout ce qui pouvait encore le rattacher à l’Eglise. Le corps qui ne pouvait être totalement dénudé, fut par la suite jeté dans une fosse commune après avoir été amputé de trois doigts (ceux avec lesquels se fait la bénédiction papale).
Ce n’est pas pour autant la fin de l’étonnante histoire du Pape Formose puisque quelques jours après, il sera de nouveau exhumé pour être finalement jeté dans le fleuve Tibre. Son corps sera heureusement récupéré par des pécheurs qui lui donneront une sépulture discrète.
Etienne VII aura également une fin tragique puisqu’il sera emprisonné quelques mois après, pendant une insurrection populaire, tous les insignes de son rang lui seront enlevés et il sera étranglé dans sa cellule.
Un an après ce procès, le concile décidera qu’il serait désormais interdit de juger les morts et de brutaliser les évêques.
Une fin mystérieuse: L’histoire de Formose est entachée de mystère, aussi la fin que l’on prête à cette histoire varie selon les historiens: pour certains, Formose qui a par la suite été inhumé de façon solennelle dans la basilique Saint Pierre y repose toujours, pour d’autres, la dépouille est de nouveau extraite en 905 par Serge III, alors Pape, et elle est re jugée, amputée de trois doigts à l’autre main, et décapitée. Le corps est par la suite jeté une nouvelle fois dans le Tibre où il ne sera pas récupéré.
Ce point est l’objet de toutes les interprétations et est, sans doute, le principal argument de ceux pour qui Formose est portugais et non corse. Pourtant il convient de souligner que Porto n’est pas forcément au Portugal. Ainsi au IIIe siècle fut créé un « Diocèse de Porto », en Italie, et plus particulièrement à Rome même, qui était l’un des « anciens diocèses » réservés aux cardinaux-évêques (cardinaux de plus haut rang dans le Saint Collège), ceux donc qui faisaient les Papes.
Une précision s’impose à ce stade, le Diocèse de Porto fut réunit à celui de Sainte-Rufine et cela en 1119, soit bien après la mort de « notre » Pape, qui plus est Porto (Portugal) ne fut reconquise qu’en 868 après plus d’un siècle d’occupation musulmane.
Texte composé par Crys à partir de divers documents
Voilà la première publication d’article

Extra ces petites anecdotes lors de vos balades.
Les internautes seront certainement ravis comme moi de les lire
A salut